LA PROVENCE
Écoutez la promesse que
souffle le Mistral
Quand il berce le Rhône
en suivant son sillon
Et caresse ses berges dans un
fol tourbillon
Pour répandre, alentour,
le parfum provençal.
Aux deux pieds du delta il promène
sa voix,
Affolant les paillettes de nos
plages dorées
Tandis que, sous son poids, la
Méditerranée
Vient saigner les rochers de multiples
gravois.
Dans un monde d'oursins harcelé
par la houle,
Des algues dodelinent au milieu
des poissons
Sur un relief rugueux comme des
durillons,
Où vont s'agglutiner tous
les essaims de moules.
Parmi les tamaris, à l'abri
des roseaux,
Un flamant, un colvert, une aigrette
s'envolent.
Dans un nid l'oisillon, que la
mère cajole,
Affrète son plumage et
perd ses oripeaux.
Le vol de l'halbran perce l'ombre
du soir.
Il promène, orgueilleux,
sa première livrée.
Quand l'alouette pouce sa douce
mélopée,
La camargue s'étend comme
un grand reposoir.
Bientôt sous la charmille
noyée de crépuscule,
L'élytre du grillon frotte
son cri aigu
Et le croassement batracien contigu
Ébauche son alto quand
s'endort la cigale.
Dans un jardin d'étoiles
sombre le firmament
Comme un voile perlé qui
étale sa traîne,
Comme le gui en fleurs dans l'immense
garenne,
Comme une nuit de jais peuplée
de vers luisants.
Quand le limpide azur se macule
d'ouate,
C'est pour se faufiler en gouttes
de diamants
Sur les feuilles cuivrées
qui respirent l'encens,
La résine brûlée
et la nature moite.
S.R.
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